Les polypes

Le polype de la corde vocale est une tuméfaction bénigne, régulière et arrondie le plus souvent, développée à la surface de la corde vocale. A la différence des polypes se développant par exemple au niveau du colon ou de l'utérus, le polype de la corde vocale ne dégénère jamais.

Le polype est la conséquence d'une blessure de la partie superficielle de la Lamina Propria, avec accumulation locale de sang. Secondairement, le caractère hémorragique de la lésion peut disparaître, laissant place à des sérosités.

Le mécanisme lésionnel à l'origine de la formation d'un polype est un effort à glotte fermé suivi d'un écartement des CV avec passage du flux d'air avec une très forte pression. Le polype apparaît ainsi brutalement, suite à des cris violents, des efforts à glotte fermée (soulèvement d'une charge lourde, accouchement...), des efforts de toux.

Dans la grande majorité des cas, les patients peuvent dater précisément l'apparition de la dysphonie, et la mettent en rapport avec un contexte bien défini.

Le polype est une pathologie touchant préférentiellement les adultes (cette lésion est exceptionnelle chez l'enfant prépubère).

Caractéristiques du polype

L'examen au miroir permet de visualiser le polype, tant il déforme par sa présence la corde vocale. La lésion soulève la muqueuse de la corde vocale au niveau de son bord  libre ou de sa face supérieure, le plus souvent dans la moité antérieure de la corde musculo-membraneuse.

À l'intérieur de la lésion, se trouvent de la fibrine et des néovaisseaux. Si les sérosités prédominent, la lésion apparaît gélatineuse, d'une couleur proche de celle de la muqueuse cordale. On parle dans ce cas de polype muqueux ou oedèmateux. Si le polype est rempli de sang, il apparaît rouge, contrastant avec le reste de la corde vocale. On parle alors de polype angiomateux.

L'implantation du polype sur la corde vocale peut-être fine (avec une petite tige comme la queue d'une cerise), et on parle de polype pédiculé. Ce type de lésion peut être mobile à la surface de la corde vocale, entraînant une dysphonie fluctuante dans ses caractéristiques et son intensité. L'implantation du polype sur la corde vocale peut être large : le polype est dans ce cas "sessile". La lésion n'est pas mobile à la surface de la corde vocale et le retentissement acoustique est stable dans le temps.

Dès qu'il est volumineux, le polype gène l'affrontement des cordes vocales et rigidifie la corde au niveau de son insertion.

L'examen vidéolaryngostroboscopique permet de préciser le comportement vibratoire du polype pendant la phonation.

Lésion développée à la surface de la CV, le polype n'interrompt pas les vibrations ni les ondulations cordales. Il se déplace avec la zone de la muqueuse sur laquelle il repose, sans pour autant être le siège de vibrations ni d'ondulations.

Quel que soit son contenu (muqueux ou hémorragique), le polype ne se laisse pas déformer lors du contact entre les CV: localisé sur le bord libre, il va, en fonction de son volume, gêner l'affrontement cordal et la synchronisation vibratoire.

Conséquences acoustiques

Les altérations vocales liées à la présence d'un polype dépendent de son volume et de sa situation par rapport au bord libre de la corde. Quand le polype atteint le bord libre, la voix est souvent très altérée, alors qu'elle peut être dans les limites de la normale lorsque le polype se développe à la face supérieure de la corde.

Lorsque le polype est pédiculé, la voix très altérée quand le polype se place entre les bords libres, alterne avec une voix quasi normale, quand le polype passe au-dessus ou au-dessous des cordes.

 

Principes thérapeutiques

Le polype est une lésion en rapport avec un effort glottique massif et ponctuel, survenant le plus souvent chez un individu présentant un comportement de forçage vocal chronique passé inaperçu (ou présentant une lésion cordale parfois congénitale).

La recherche d'un geste vocal équilibré, le moins traumatisant possible pour la muqueuse cordal est un objectif prioritaire de la prise en charge thérapeutique. La prescription d'une rééducation orthophonique est ainsi justifiée pour ces patients.

Cependant, la présence de ce type de lésion (au contenu ferme, d'autant plus quand elle s'est développée sur le bord libre), gêne considérablement l'affrontement cordal dès la mise en position phonatoire, obligeant à un comportement de serrage pour obtenir le meilleur contact possible. Il est donc difficile de construire un geste vocal souple et efficace tant que la lésion reste présente entre les CV. Par ailleurs, à la différence des nodules, le polype ne disparaît pas, même lorsque le geste vocal n'est plus traumatisant pour la muqueuse cordale.

Il est alors souvent nécessaire de recourir à une phono-chirurgie pour permettre de travailler efficacement les différents secteurs du geste vocal. Après quelques séances d'orthophonie, surtout si la phonation ne peut se faire qu'avec une adduction forcée des cordes, la décision chirurgicale est proposée : il est fondamental, avant d'avoir recours à ce geste, que le patient ait compris qu'il ne s'agit que d'une étape du traitement. C'est l'obtention d'une production vocale par un geste phonatoire équilibré entre posture, souffle expiratoire, vibration cordale et résonances qui reste l'axe principal de la prise en charge.

La seule exérèse chirurgicale du polype conduit fréquemment à des récidives...

Au cours du geste chirurgical, on recherche systématiquement une lésion congénitale associée au polype ou une lésion réactionnelle à la présence du polype (nodule sur l'autre corde par exemple). La chirurgie est suivie d'un repos vocal absolu de sept jours, à l'issue desquels la reprise de la phonation se fait après contrôle de l'aspect laryngé, accompagnée par l'orthophoniste.

L'amélioration vocale est souvent spectaculaire, expliquant le manque d'intérêt, en cas de geste chirurgical précoce, du suivi orthophonique par le patient.