Les dysphonies:

Définitions et bilan phoniatrique

Définitions

Dysphonies

Définition médicale

La dysphonie est une altération de l’un ou de plusieurs éléments du trépied acoustique de la voix, à savoir la hauteur, l'intensité et/ou le timbre.

Cette définition implique une altération vocale audible par le patient, par l'entourage et par celui qui évalue la voix

Définition phoniatrique

La dysphonie est un trouble momentané ou durable de la fonction vocale, ressenti comme tel par le sujet lui-même ou son entourage, et qui peut faire l’objet d’une évaluation phoniatrique.

Cette définition implique que l'ensemble des troubles de la fonction vocale peut faire l'objet d'une évaluation, que ces troubles soient des altérations acoustiques, des troubles du geste vocal, ou des troubles subjectifs tels que la fatigue, le manque d'efficacité...

Dysphonie d'origine organique

La dysphonie est le résultat d’une altération de la fonction vocale générée et/ou entretenue par une lésion organique développée sur une (ou les 2) CV.

Cette définition implique qu'il existe une altération macroscopique (visible à l'oeil nu) des tissus composant la CV.

Les lésions organiques peuvent être congénitales (présentes depuis la naissance) ou acquises (apparues au cours de la vie du patient).

Les lésions acquises peuvent être bénignes (sans aucune propension à la dégénérescence cancéreuse), précancéreuse ou cancéreuse.

Les lésions acquises peuvent être en rapport ou non avec un comportement de forçage vocal, aigu ou chronique.

Dysphonie d'origine dysfonctionnelle

La dysphonie dysfonctionnelle est le résultat d’une altération de la fonction vocale générée et entretenue par une perturbation du geste vocal dans son ensemble (soufflerie, vibrateur et/ou résonateurs).

Cette définition implique l'absence d'altération organique macroscopique des CV à l'origine des difficultés vocales. C'est le geste vocal en lui-même qui est la cause de la dysphonie (troubles de la coordination pneumo-phonique ou phono-résonantielle, PSG trop élevée ou non contrôlée, élévation inadaptée du tonus musculaire laryngé, défaut d'utilisation des résonateurs...).

Le terme « dysfonctionnel» recouvre une notion dynamique : le geste vocal, performant ou non, se construit progressivement, les différents éléments de l’appareil phonatoire (ventilation, CV, résonateurs) participant chacun à l’édification d’un équilibre vocal.

La dysphonie dysfonctionnelle peut être simple ou compliquée par une lésion organique (en rapport avec le comportement de forçage vocal et les microtraumatismes tissulaires qu'il engendre au niveau de la CV): on parle alors de laryngopathie dysfonctionnelle.

Mais une lésion organique présente sur les CV, asymptomatique (sans dysphonie associée) pendant un certain temps, peut être à l'origine d'un dysfonctionnement du geste vocal (le plus souvent à l'occasion d'une nouvelle modalité d'utilisation vocale). La dysphonie est dans ce cas d'origine fonctionnelle (la présence de lésion organique déstabilise à un moment donné, pour une utilisation vocale particulière, le geste vocal). En aidant le patient à trouver un geste vocal adapté aux caractéristiques de ses CV, la fonction vocale peut redevenir performante, malgré la présence de l’atteinte organique.

Notions

Effort vocal

L’effort vocal correspond à une augmentation de l’énergie musculaire et ventilatoire nécessaire à la phonation, sans que cela ne soit considéré́ comme pathologique. Il s’agit généralement d’un mode de phonation impliquant une intensité et/ou une durée de production vocale supérieure à celle utilisée couramment par un individu.

Efficacité vocale

L’efficacité vocale peut être définie selon plusieurs plans :

- Le rapport entre les caractéristiques acoustique du son produit et l’énergie dépensée pour le produire

- Le rapport entre l’énergie dépensée et l’intelligibilité perçue par un interlocuteur dans un contexte particulier de communication

Certaines personnes ont plus que d’autres la capacité d’adapter la gestion de l’effort vocal en fonction des situations dans lesquelles elles doivent produire leur voix :

- En ajustant de façon adéquate leur effort aux besoins de la situation de communication (par exemple en se rapprochant de l’interlocuteur, en demandant le silence avant le parler...)

- En adoptant des stratégies de communication moins coûteuses en énergie, pour une même intelligibilité́ perçue par l’auditeur (par exemple en allongeant la durée des consonnes plutôt qu’en augmentant l’intensité́ vocale de façon globale...)

- En optimisant la répartition de l’effort entre le larynx et les autres organes de l’appareil phonatoire, (par exemple en augmentant l’intensité́ vocale par des techniques résonantielles et par une bonne gestion du souffle...), la finalité de ces configurations étant une vibration optimale des CV dans le larynx

Fatigue vocale

La fatigue vocale est la conséquence de l’effort vocal. Elle est ressentie comme le besoin de repos vocal. Cette fatigue correspond à un ensemble de symptômes ressentis subjectivement par l’individu qui a l’impression de devoir faire plus d’efforts pour produire sa voix, et qui, secondairement, ressent une diminution de l’envie de parler. Cet état peut être perçu acoustiquement par une modification de la qualité́ vocale, avec une perte du contrôle de la hauteur et de l’intensité, et une diminution de l’efficacité́.

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Le bilan phoniatrique

Introduction

Les circonstances d’apparition d’une altération ou d’une modification de la voix sont extrêmement nombreuses. Cependant, on peut d'emblée opposer 2 grands types de circonstances qui entraîneront des conduites tout à fait différentes :

1- Le trouble vocal est le signal d'alarme d'une pathologie potentiellement à risque vital

Certaines pathologies associent un trouble vocal à une situation potentiellement dramatique à plus ou moins long terme. C'est le cas, par exemple :

- D'une anomalie congénitale laryngée (atrésie...), entraînant une détresse respiratoire néo-natale

- De troubles de la déglutition ou de difficultés respiratoires

- D'un processus infectieux aigu (épiglottite...)

- D'un corps étranger ( caillou, jouet ou aliment chez un enfant ou une personne âgée)

- D'un traumatisme laryngé externe (choc lors d'un accident de la voie publique, d'une agression ou d'une activité sportive)

- D'un traumatisme laryngé interne (détresse respiratoire après une intubation ou une chirurgie du cou)

- D'un processus tumoral de la sphère ORL

Dans ces situations, l'altération vocale passe au second plan, après la prise en charge parfois en urgence (assurer la liberté des voies aériennes supérieures) de la pathologie à risque vital. Secondairement, l'épisode aigu passé et/ou l'état général stabilisé et/ou la lésion tumorale éliminée, le trouble vocal peut devenir séquellaire, rejoignant ainsi le groupe suivant.

 2- L'altération vocale constitue la préoccupation majeure ou exclusive du patient

C'est de ce type d'altérations vocales dont il sera question dans ce chapitre sur les pathologies phoniatriques.

Ainsi, devant toute plainte vocale, la première étape du bilan consiste à rechercher des signes évocateurs d'une pathologie à risque vital. A la moindre inquiétude, le bilan phoniatrique s'interrompt pour laisser place au bilan ORL (complété éventuellement par d'autres bilans), et reprendra lorsque la situation clinique du patient sera stabilisée.

Le bilan phoniatrique clinique

Entretien

Chaque patient rencontré au cours d’un bilan vocal nous fait le récit d’une voix au travers de laquelle se raconte une partie de sa vie...En tentant d’analyser, sur le plan phoniatrique, chaque chapitre de cette histoire, on essaie de s’approcher au plus près de la plainte, de la demande, afin d’affiner le diagnostic et de dessiner le projet thérapeutique.

Motif du bilan vocal

Les motifs exprimés le plus fréquemment lors de la consultation sont :

- Le souci vocal professionnel : conserver ou retrouver sa voix, pour être plus endurant, pour mieux convaincre, pour être crédible, pour exercer une autorité...

- Les douleurs laryngées et la fatigabilité vocale

- La cancérophobie

- L'examen systématique (chanteurs, comédiens...) ou demandé par un tiers (parents d'un enfant dysphonique, orthophoniste suivant un patient pour une autre pathologie...)

Histoire du trouble vocal

L'histoire du trouble vocal est importante à préciser, car on y trouve souvent des éléments d'orientation diagnostique.

 Début et évolution

 - Date d'apparition des difficultés vocales (naissance, enfance, puberté, âge adulte, âge avancé...)

- Circonstances d'apparition : progressives ou brutales, après un traumatisme vocal, après un effort vocal prolongé... Après un épisode inflammatoire (grippe, laryngite), après un geste médical ou chirurgical...

- S'agit-il du premier épisode ? Sinon, à quel rythme surviennent les difficultés et quelles mesures ont-elles déjà été prises ?

- À quel moment surviennent les difficultés : matin, soir, fin de semaine ?

- Le trouble est-il permanent ou intermittent ?

- Quelles sont les circonstances où le trouble vocal gêne le plus : dans l'exercice professionnel ? Dans le chant ? Dans toutes les activités vocales... ?

- Le repos vocal soulage-t-il ? Si oui, au bout de combien de temps ?

Signes associés au trouble vocal

- Fatigabilité vocale

- Gêne, sensation de striction, sécheresse, cuisson, serrage...

- Raclage ou hemmage

- Douleurs au niveau des muscles du cou

- Douleurs en parlant, en avalant, gêne à la déglutition

- Gène respiratoire, toux

- Pyrosis

Histoire du patient

Dans cette partie de l'entretien, on essaie de trouver, parmi les antécédents du patient, des éléments susceptibles de déclencher, d'entretenir ou d'aggraver des difficultés vocales.

Antécédents médicaux

- O.R.L. : sinusite chronique, laryngite, terrain allergique, troubles de l'audition

- Pulmonaires : pathologie respiratoire aiguë ou chronique, toux chronique, asthme et ses traitements

- Endocriniens : troubles hormonaux (et notamment la pathologie thyroïdienne), traitement hormonal, statut par rapport à la ménopause, troubles de la puberté

- Intervention chirurgicale récente avec intubation, chirurgie de la thyroïde, de la région cervicale ou du thorax (recherche d'une atteinte du nerf récurrent)

Antécédents familiaux

- Sujets dysphoniques dans la famille ou dans l'entourage (Recherche de pathologies cordales héréditaires, possibilité de dysphonie par mimétisme vocal)

- Sujets sourds dans la famille (utilisation de la voix à forte intensité...)

Conditions de travail

- Profession avec charge vocale importante (enseignants, chanteurs, comédiens, commerçants...)

- Travail en milieu bruyant, enfumé, empoussiéré, climatisé, avec efforts de soulèvement...

Loisirs

- Pratique du chant (chorale ou cours individuels)

- Pratique d'un instrument à vent

- Entraîneurs, supporters...

Hygiène de vie

Habitudes de consommation de tabac, alcool et autres toxiques (cannabis...)

Pendant cet entretien, l’examinateur a souvent déjà pu évaluer le type et l'importance de l’anomalie vocale : altération laryngée ou des résonateurs, troubles de la coordination pneumo-phonatoire, de la posture...

Quelle que soit la pathologie en cause, c’est pendant cet entretien, alors que le patient se raconte sans avoir l’impression que sa voix fait déjà l’objet d’une évaluation, que la voix va être analysée selon différents éléments :

- Ce qu'on entend de cette voix (acoustique)

- La façon dont elle est fabriquée (physiologie)

- Le sentiment qu'elle véhicule (psychologie)

- L'intention par rapport à autrui (mode d'action)

Ainsi, tout en écoutant le patient, tout en reconstituant l’histoire du trouble vocal, le praticien évalue et côte la voix, à un moment où elle est la plus naturelle...

Examen ORL

L'examen O.R.L. « classique » permet d'apprécier l'état des muqueuses, l'état buccal et dentaire, la mobilité de la langue, du pharynx, des fosses nasales, du voile du palais... Si nécessaire, il permet également de vérifier l'intégrité de l'audition.

L'examen du voile du palais est important, en raison de l'interaction des sphincters glottiques et vélaires (une fuite vélaire peut être compensée par un forçage vocal laryngé).

Examen au miroir laryngé

Le miroir laryngé est placé dans la bouche du patient en repoussant légèrement le voile du palais sans toucher la base de langue ni la paroi postérieure du pharynx (qui sont responsables du réflexe nauséeux). Orienté à 45 degrés, il permet d'examiner dans son ensemble le larynx.

On peut alors apprécier :

- L'anatomie et la dynamique laryngée

- L'état des muqueuses (glaires, signes de laryngite, de reflux gastro-oesophagien...)

- La présence d'une lésion organique suspecte (leucoplasie, lésion précancéreuse, cancer...)

Examen phoniatrique

Au terme de l'entretien et de l'examen O.R.L., l'origine de l'altération vocale s'avère le plus souvent multifactorielle.

Le phoniatre va alors essayer de distinguer les dysphonies organiques pures, les dysphonies dysfonctionnelles pures, les dysphonies aux mécanismes intriqués...

Le bilan phoniatrique va associer l'observation de l'aspect statique du larynx, sa fonction dynamique notamment grâce à la stroboscopie, à l'intégrité et le fonctionnement des résonateurs, à l'adaptation de la ventilation aux besoins phonatoires, et le comportement phonatoire dans une approche globale.

Le comportement phonatoire met en oeuvre différents systèmes qu'il va falloir évaluer :

- L'appareil respiratoire (soufflerie)

- L'appareil laryngé (vibrateur)

- Les cavités supra laryngées (résonateur)

- Le fonctionnement neurologique et l'état psycho-affectif

Le phoniatre va devoir ainsi observer pendant son examen :

- Le statut O.R.L. du patient

- Les paramètres acoustiques de la voix

- L'existence de symptômes d'ordre neurologique et leur retentissement sur la phonation

- Les difficultés psychologiques éventuelles et leur retentissement sur la fonction vocale

- Les conditions d'utilisation vocale

Pour la réalisation de ce bilan, le phoniatre peut compléter son examen clinique par diverses investigations complémentaires.

Cependant, le meilleur outil d'analyse de la voix restera toujours l'oreille de l’examinateur, associée à ses facultés d'écoute et de compréhension de l’histoire du trouble vocal de son patient.

De la qualité de la relation instaurée au cours du bilan phoniatrique va dépendre l'investissement du patient dans le projet thérapeutique d'une manière globale, dans la rééducation orthophonique en particulier.

Méthodes d'évaluation clinique de la voix

Analyse du trépied acoustique

L'évaluation de la qualité de la voix est une étape fondamentale de la consultation phoniatrique. L'approche subjective « à l'oreille » demeure la règle et reste souvent la seule méthode effectivement utilisable en pratique courante. Cependant cette approche démontre un certain nombre de limites. En particulier, la nécessité pour l'évaluateur d'être particulièrement rompu à cet exercice et de disposer de critères précis d'analyse.

Il est particulièrement important d'enregistrer systématiquement la voix et de recueillir les échantillons vocaux dans des situations variées d'activités vocales : lecture, conversation, voyelle tenue, voix d'appel, voix chantée… L'enregistrement systématique permet des comparaisons ultérieures, la réalisation d'analyses et la soumission à des jurys d'écoute.

En situation pratique, trois paramètres acoustiques sont communément admis pour l'appréciation de la qualité de la voix : la hauteur, l'intensité, le timbre.

- La hauteur

La fréquence d'un son émis pendant la phonation correspond au nombre de cycles laryngés observés par seconde. Elle varie, bien entendu, selon les conditions d'émission du son et, dans des conditions identiques, en fonction de l'intonation donnant la mélodie.

La mesure de la hauteur moyenne de la voix (F0) peut se réaliser à l'oreille, ou avec un système d'analyse vocale (microphone du stroboscope notamment).

- L'intensité vocale

L'intensité vocale correspond à l'amplitude des impulsions laryngées et donc à l'amplitude du signal acoustique qui en résulte. C’est certainement le critère le plus facile à juger.

L'évaluation à l'oreille est donc assez aisée et permet généralement de classer les voix selon trois catégories : faible, moyenne ou forte.

La voix conversationnelle est aux alentours de 65 dB, la voix forte autour de 80dB, la voix chuchotée à faible intensité est à 30 dB.

L’intensité est grandement influencée par les habitudes familiales.

L’effet Lombard ( augmentation réflexe de l’intensité de la voix en milieu bruyant), participe au contrôle de l’intensité de la voix.

- Le timbre

L'appréciation du timbre reste sans doute l'élément le plus délicat dans l'évaluation de la qualité de la voix. Si l'oreille humaine est capable d'apprécier très finement le timbre de la voix et ses variations, la difficulté surgit lorsqu'il s'agit de caractériser ces observations.

En effet, les qualitatifs ne manquent pas dans la littérature et chacun dispose habituellement de ses propres critères.

Ainsi, dans une volonté d'unification du vocabulaire des pratiques phoniatriques, de nombreuses échelles sont proposées pour coter la voix normale et la voix pathologique. Actuellement, l'échelle la plus couramment utilisée  est celle d’HIRANO.

L'échelle GRBAS de Hirano repose sur l'appréciation de cinq caractères de la voix, chacun noté selon quatre niveaux (0 : normal à 3 : atteinte sévère).

Certains phoniatres ont proposé d'ajouter un item « I » pour instability, car la voix peut fluctuer au cours de la même conversation. De normale sur le plan phoniatrique à certains moments, elle peut être pathologique à d'autres.

D'autres phoniatres, dont je fais partie, ont adapté profondément cette échelle afin de la rendre la plus précise et la plus reproductible possible.

Analyse de la posture et du geste vocal

L’analyse vocale n'a de sens que si l'on considère la voix comme la résultante d'un geste vocal précis émanant du fonctionnement en synergie d'une série d'organes, de muscles et de nerfs.

Une bonne voix suppose un fonctionnement souple mais précis, sur des bases physiologiques qu’il faut pouvoir analyser, d'où l’établissement, au cours du bilan d’une dysphonie, d’un profil de fonctionnement vocal.

Ce profil est attentif à l'attitude corporelle dans son ensemble (position des pieds, nuque, dos, jambes...). Il tient compte de la souplesse de l'appui corporel, de la respiration dans sa phase inspiratoire et expiratoire. Il analyse les reprises d'air, les attaques, les finales, les passages, le placement de la voix...

Le profil de fonctionnement vocal est un profil de souplesse. Tout est question d’équilibre dans le geste vocal : équilibre entre les forces musculaires et les forces élastiques, entre les pressions d’air et les pressions d’accolement, entre les muscles antagonistes… La voix ne pose pas de problème quand cet équilibre est trouvé par le patient. Mais si quelque chose change, sur un organe ou dans le fonctionnement musculaire, dans la commande neurologique ou dans la tension psychomotrice liée au fonctionnement psychique, dans l’environnement du patient, l’équilibre se rompt et la dysphonie apparaît.

L’établissement du profil de fonctionnement vocal nécessite l’observation, à l'état de repos et en situation de phonation variée (conversation, comptage, lecture, chant), de différents éléments :

- Port de la tête, niveau d'activité (souplesse ou crispation) de la musculature du cou, des mâchoires, du dos, des épaules

- Respiration : ventilation nasale ou buccale, type de ventilation (thoracique supérieure, inférieure, abdominale, vertébrale...), rythme et superficialité de la ventilation, adaptation aux différentes modalités phonatoires...

- Attaques et finales dures, souples, précises, instables, avec ou sans effort musculaire, en coup de glotte, à bout de souffle...

Méthodes d’évaluation instrumentale de la voix

L'analyse instrumentale des paramètres de la voix va apporter une dimension objective qui permet de contourner en partie les inconvénients de l'évaluation subjective.

En général, les signaux recueillis pourront être de plusieurs types et feront ou non l'objet d'un traitement informatique :

- Temporel : on mesure la durée de production d'un signal donné

- Acoustique : le signal est recueilli grâce à microphone, puis analysé sur le plan informatique (logiciels d'analyse vocale)

- Imagerie : le fonctionnement laryngé est observé grâce à une caméra adaptée à un endoscope, avec un éclairage stroboscopique. Depuis peu, l'arrivée des caméras ultra-rapides complète les données vidéos.

- Aérodynamique : les capteurs enregistrent des pressions ou des débits d'air (buccal ou nasal)

- Electroglottographique : grâce à deux électrodes mises en place de part et d'autre du larynx, la variation du signal électrique permet d'analyser les phases d'accolement ou de décollement des cordes vocales

- Electromyographique : grâce à des électrodes, on mesure l'activité électrique des différents muscles laryngés intrinsèques

En fonction de ses habitudes, du mode d'exercice professionnel, le phoniatre utilise différents instruments pour réaliser son bilan. Au minimum cependant, le bilan phoniatrique nécessite un enregistrement audio et vidéostroboscopique.

La vidéo-laryngo-stroboscopie (VLS)

La VLS est un examen endoscopique du larynx, réalisé avec un enregistrement vidéo et un éclairage stroboscopique.

La vibration cordale a une fréquence située en moyenne entre 100 et 250 Hz : le déplacement des bords libres des CV pendant la phonation n'est pas visible par l'oeil humain. En effet, les cellules de la rétine gardent en mémoire une image pendant environ un dixième de seconde après son apparition. Jusqu' à 24 images/seconde, l'œil humain peut distinguer 2 images successives. Mais au-delà de cette fréquence, les images fusionnent. A la fréquence de 100 Hz (100 cycles complets de la CV en une seconde), notre œil ne perçoit que du flou au niveau du bord libre, ce qui rend impossible l'observation précise de ses anomalies.

La stroboscopie permet la visualisation précise des cordes vocales en mouvement ainsi qu'une vision détaillée des bords libres.

- Principes de la VLS

A proximité du larynx, au contact de la « pomme d’Adam », on place un microphone relié à un stroboscope, source lumineuse qui déclenche des flashes selon une fréquence déterminée.

Le stroboscope est branché sur un endoscope (rigide ou souple) que l'on va positionner à proximité des cordes vocales du patient.

La fréquence des éclairs lumineux est déterminée par la fréquence du fondamental de la voix du patient (la synchronisation entre la source lumineuse et le F0 est automatiquement déterminée). Lorsque la fréquence du stroboscope est identique à la fréquence des vibrations des cordes vocales, l'observateur voit une image très précise, statique du bord libre des CV. Lorsque la fréquence du stroboscope est décalée par rapport à la fréquence des vibrations des cordes vocales, l'observateur voit les mouvements laryngés "au ralenti."

L'effet stroboscopique donne une vision détaillée de la corde vocale et surtout de ses mouvements lors de l'émission sonore : des anomalies laryngées minimes, qu'elles soient organiques ou fonctionnelles peuvent être alors visualisées, alors qu'elles ne sont pas détectables sous un éclairage normal.

- Déroulement de l'examen

Après avoir positionné la source lumineuse à proximité du larynx (endoscope rigide ou épi-pharyngoscope, naso-fibroscope souple), on demande au patient d'émettre des sons sur une tonalité spontanée au départ, puis dans les différents mécanismes laryngés. En fonction de l'anatomie du patient, et surtout de la position de l'épiglotte, on va lui demander d'émettre des voyelles différentes («u», « é », « i »...).

Au cours de l'examen, on peut apprécier :

- L'aspect du bord libre des cordes vocales

- La qualité de l'accolement glottique

- L'amplitude de l'ondulation muqueuse

- La symétrie et la synchronisation de l'ondulation muqueuse entre les deux cordes vocales

- La régularité de l'ondulation

- L'existence d'un arrêt localisé ou global de l'ondulation au niveau d'une corde vocale ou des deux, l'absence de propagation de l'ondulation sur la face supérieure de la corde vocale

- Le comportement hypertonique ou hypotonique laryngé

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